Pour sauver la planète, il faudrait passer à la semaine de 6 heures
D’après le groupe de réflexion Autonomy, les pays signataires de la COP21 devraient réduire drastiquement le temps de travail, afin de diminuer leurs émissions de gaz à effet de serre et limiter le réchauffement climatique. Un de ses chercheurs a calculé le nombre idéal d’heures de travail hebdomadaire pour trois pays.
Et si la réduction du temps de travail permettait de lutter contre le dérèglement climatique ? Dans une étude récente, le groupe Autonomy, dont les travaux de réflexion portent sur l’organisation du travail, démontre qu’en travaillant moins nous pourrions réduire considérablement nos émissions de gaz à effet de serre.

Un de ses chercheurs affiliés, Philippe Frey, doctorant à l’Institut de Technologie de Karlsruhe (Allemagne), s’est concentré sur trois exemples : le Royaume-Uni, la Suède et l’Allemagne. Ces trois pays ont signé l’accord de Paris sur le climat.

Pour rappel, en 2015, les pays signataires se sont engagés à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre afin de limiter le réchauffement climatique à 2 °C maximum d’ici 2100.

D’après les calculs de Philippe Frey, les Suédois devraient travailler 12 heures par semaine, les Britanniques 9 heures et les Allemands 6 heures afin de tenir leur promesse. À l’échelle mondiale, les pays de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques), dont la France fait partie, devraient limiter leur temps de travail à 5 heures et demie par semaine au lieu des 40,5 heures hebdomadaires actuelles. Toutefois, ce chiffre n’est pas très parlant, car il existe de fortes disparités entre les différents pays de l’OCDE.

Pour en arriver à ce résultat, Philippe Frey a utilisé les chiffres de l’OCDE sur les émissions de gaz à effet de serre par secteur d’activité et par pays. La différence entre l’Allemagne, le Royaume-Uni et le Suède s’explique par la productivité de leurs travailleurs, mais aussi par les industries qu’ils privilégient.

Ainsi, les Britanniques travaillent en moyenne 42 heures par semaine, soit deux de plus que les Allemands. Mais l’économie allemande génère plus d’émissions de gaz à effet de serre que l’économie britannique, ce qui explique pourquoi les Allemands devraient moins travailler que les Britanniques.

En Suède, l’économie est plus respectueuse de l’environnement. L’écart entre le nombre hebdomadaire d’heures actuellement travaillées (38 heures) et le nombre d’heures idéal (12 heures) est donc moindre.

Une urgente oisiveté

Des études précédentes affirmaient déjà que la réduction du temps de travail permettait de diminuer les émissions de gaz à effet de serre. En un sens, les résultats de cette étude sont logiques : si la production baisse, la consommation baisse aussi. C’est un changement radical de la société que ce rapport préconise.

« Je dirais que la crise climatique nécessite une baisse sans précédent de l’activité économique », écrit l’auteur qui cite Le droit à la paresse de Paul Lafargue.

Au XIXe siècle, cet économiste faisait l’éloge de l’oisiveté car il estimait que les travailleurs n’avaient pas assez de temps pour profiter de la vie. Sauf qu’aujourd’hui, c’est pour résoudre l’urgence climatique que Philippe Frey propose de limiter le temps de travail… « Si la durabilité écologique nécessite une baisse générale de la consommation, alors l’augmentation du temps de loisir n’est pas tant un luxe mais une urgence », dit-il.
« L’augmentation du temps de loisir n’est pas tant un luxe mais une urgence », selon l’auteur de cette étude. (Photo : janka00simka0 / Pixabay)

Toutefois, le chercheur est conscient que la réduction du temps de travail, seule, n’est pas suffisante. « Il est nécessaire de mettre en place d’autres mesures qui facilitent une transformation économique radicale, comme remplacer certains métiers du secteur industriel par des métiers du secteur tertiaire, l’extraction d’énergies fossiles par des actions respectueuses de la planète (par exemple, les opérations de reforestation) », indique-t-il. En un mot, la lutte contre le réchauffement climatique ne se fera pas sans une intervention politique sensée.

Par Hélaine Lefrançois
A lire sur le site Anti-K