07 Sept 2019
Né au début des années 30, Raoni Metuktire est le cacique du peuple Kayopo d’Amazonie. Chef de cette communauté brésilienne d’environ 7 000 âmes, il s’est fait connaître en 1989 en accompagnant le chanteur Sting dans une tournée mondiale, pendant laquelle il a rencontré, entre autres, François Mitterrand, Jean Paul II ou l’empereur du Japon. Jeudi, il a tenu au Bourget une conférence grand public, durant laquelle il s’est élevé contre la construction de barrages hydroélectriques et a lancé un appel aux dons pour son institut. L’interview a été réalisée via une double traduction, du kayopo au portugais, puis du portugais au français. Et vice versa.
«Je suis venu à la COP21 pour demander enfin aux gouvernements de prendre les mesures qui s’imposent contre la dégradation du milieu ambiant, et pour lancer l’alliance des Gardiens de la Mère Nature, avec d’autres chefs indigènes. Il est indispensable qu’on s’unisse car nous subissons tous les mêmes menaces face à un ennemi identique, et c’était l’occasion de nous rencontrer. Notre texte avec des propositions pour défendre la nature et les générations futures a été signé par 8 chefs, venus d’Amérique du Nord, du Pérou, de Bolivie, d’Afrique, de Papouasie, de Thaïlande [en plus de 5 chefs amazoniens, ndt].
«Les jeunes sont obligés par la loi brésilienne d’apprendre le portugais, et avec la langue ils apprennent la manière d’être des Brésiliens. Ils sont très attirés par la technologie, ce qui a deux effets opposés. Ce qui est positif, c’est qu’ils nous ramènent des informations sur le monde, et que nous sommes au courant des choses qui nous concernent. Le mauvais côté, c’est que cela les éloigne de la culture traditionnelle, ils s’habituent à des divertissements qui ne sont pas typiques. Dès que l’on apprend que l’un d’eux a des problèmes d’alcool, on le rapatrie immédiatement au village.
«Aux garçons, on leur dit d’apprendre d’abord leur culture, ensuite celle des autres. Et je leur conseille de continuer à préserver notre culture. Chez nous, la vie des femmes est très différente, elles travaillent aux champs, à la maison, transmettent aux filles leurs connaissances. C’est très important que les femmes continuent à avoir un comportement traditionnel.
«Personnellement, je ne ressens aucun problème à naviguer entre les deux cultures depuis trente ans. Je m’adapte, je regarde, j’aime découvrir le monde, les différences de climat m’amusent. J’aime beaucoup la France, et les Français m’aiment beaucoup. Au Brésil, les industries minières, agricoles et de l’énergie menacent notre forêt. Les grands propriétaires fonciers déboisent pour faire des cultures, y déversent des pesticides, qui se retrouvent dans les rivières dont nous buvons l’eau. Il faudrait boycotter les produits issus de cette dévastation, et que les Européens mangent ce qu’ils produisent sur leur propre sol. J’espère que vous allez m’aider dans ce combat, et le nerf de la guerre, c’est l’argent.»
Par Laurence Defranoux (publié le 12/12/2015)
A lire sur le site Libération
«Je suis venu à la COP21 pour demander enfin aux gouvernements de prendre les mesures qui s’imposent contre la dégradation du milieu ambiant, et pour lancer l’alliance des Gardiens de la Mère Nature, avec d’autres chefs indigènes. Il est indispensable qu’on s’unisse car nous subissons tous les mêmes menaces face à un ennemi identique, et c’était l’occasion de nous rencontrer. Notre texte avec des propositions pour défendre la nature et les générations futures a été signé par 8 chefs, venus d’Amérique du Nord, du Pérou, de Bolivie, d’Afrique, de Papouasie, de Thaïlande [en plus de 5 chefs amazoniens, ndt].
«Les jeunes sont obligés par la loi brésilienne d’apprendre le portugais, et avec la langue ils apprennent la manière d’être des Brésiliens. Ils sont très attirés par la technologie, ce qui a deux effets opposés. Ce qui est positif, c’est qu’ils nous ramènent des informations sur le monde, et que nous sommes au courant des choses qui nous concernent. Le mauvais côté, c’est que cela les éloigne de la culture traditionnelle, ils s’habituent à des divertissements qui ne sont pas typiques. Dès que l’on apprend que l’un d’eux a des problèmes d’alcool, on le rapatrie immédiatement au village.
«Aux garçons, on leur dit d’apprendre d’abord leur culture, ensuite celle des autres. Et je leur conseille de continuer à préserver notre culture. Chez nous, la vie des femmes est très différente, elles travaillent aux champs, à la maison, transmettent aux filles leurs connaissances. C’est très important que les femmes continuent à avoir un comportement traditionnel.
«Personnellement, je ne ressens aucun problème à naviguer entre les deux cultures depuis trente ans. Je m’adapte, je regarde, j’aime découvrir le monde, les différences de climat m’amusent. J’aime beaucoup la France, et les Français m’aiment beaucoup. Au Brésil, les industries minières, agricoles et de l’énergie menacent notre forêt. Les grands propriétaires fonciers déboisent pour faire des cultures, y déversent des pesticides, qui se retrouvent dans les rivières dont nous buvons l’eau. Il faudrait boycotter les produits issus de cette dévastation, et que les Européens mangent ce qu’ils produisent sur leur propre sol. J’espère que vous allez m’aider dans ce combat, et le nerf de la guerre, c’est l’argent.»
Par Laurence Defranoux (publié le 12/12/2015)
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