26 Fév 2015
A Dijon, depuis 2007, une association collecte, redistribue, transforme des fruits voués à l’abandon et au pourrissement, avec l’objectif de créer des emplois locaux. Une demi-tonne de fruits sont ainsi valorisés chaque mois par Relais-Planète-Solidaire, et plus d’une centaine d’interventions de sensibilisation ont déjà été distillées contre le gaspillage alimentaire dans les centres sociaux, les écoles et lors de fêtes de quartiers. Témoignages sur cette démarche « Fruimalin », une initiative riche de convivialité.
Cet article a initialement été publié dans la revue Campagnes solidaires.
C’est en regardant les voitures écraser des kilos de mirabelles tombées sur la chaussée, dans une rue de Dijon, que Thierry Deiller a eu cette idée simple et géniale. Un arbre fruitier adulte peut produire cent kilos de fruits. Mais seulement un cinquième est mangé par les propriétaires du jardin dans lequel il pousse. Pour ne plus laisser se perdre tous ces fruits, une solution : mettre en place un ramassage et une valorisation !
Après un CAP de menuisier puis un mastère à l’École nationale supérieure des Arts et Métiers, notre homme est habité par le désir de restaurer et de préserver l’existant – culturel ou naturel. D’où son envie de créer une association pour éviter la perte des savoirs-faire traditionnels, lutter contre l’individualisme, la solitude, le repli sur soi, la fracture entre ville et campagne.
500 kilos de fruits valorisés chaque mois
Le parcours reste à inventer, pour ne pas laisser perdre ces fruits. D’abord, lancer des appels aux propriétaires d’arbres et de terrains délaissés, en passant par les médias (radios, télévision, journaux locaux). Puis faire des tests de faisabilité, intéresser et trouver des soutiens – région, départements, municipalités – pour obtenir reconnaissance et subventions, s’entourer de bénévoles qui adhèrent au projet, être créatif, écouter, constater, concevoir, relier, prévoir et rendre possible… Bref, travailler comme des fous !
Mais les résultats sont là. Depuis sept ans, Fruimalin récolte, redistribue ou transforme près d’une demi-tonne de fruits par mois. L’association a organisé 62 « veillées Fruimalin » et plus d’une centaine d’interventions de sensibilisation. Elle a aujourd’hui une connaissance approfondie des ressources locales disponibles et non valorisées, une expertise des mécanismes du gaspillage alimentaire et une maîtrise particulière des techniques de collecte, de conservation et de transformation. La démarche a abouti à la création d’un premier emploi en mai 2012, à la mise au point d’une charte, d’une méthodologie.
Une initiative écologique et sociale
Ce soir d’automne, on entre dans la cour au milieu d’un petit jardin foisonnant. Dans l’allée, plein de cageots, surtout de tomates vertes. Sur la droite se trouve le magasin-bureau : des rayons de confitures, compotes, jus, sirops… C’est là que Thierry accueille les « clients », souvent adhérents de l’association, une cinquantaine actuellement. Tous les quinze jours, le mercredi soir, des veillées autour de la table sont organisées dans ce même local. Entre dix et vingt personnes trient, dénoyautent, épluchent, puis se restaurent en discutant chaleureusement. Les plus beaux fruits, mais aussi des légumes récupérés de la même manière, seront distribués aux bénévoles et associations, le reste est transformé, par exemple en confiture. De nouvelles recettes s’imaginent au cours des soirées et des adhérents proposent chez eux de conviviales séances de dégustations-tests.
Le local est aussi le laboratoire de fabrication des confitures et autres produits Fruimalin, ainsi que l’atelier de restauration de tableaux et de bois dorés de Claude Ducatel-Deiller, l’épouse de Thierry, qui anime depuis 2008 un groupe de consom’acteurs dijonnais. Pas de place ici pour le pressoir. Il a été installé à quelques minutes, à Varois-et-Chaignot, sur la ferme de Nicolas Bellet, un ami producteur bio. Fruimalin intervient volontiers dans les centres sociaux, les écoles, les fêtes de quartier, toujours avec le souci de montrer la richesse inépuisable que nous pouvons puiser dans ce patrimoine si nous le respectons.
La démarche a trouvé à Dijon sa vitesse de croisière. Ce modèle de consommation locale collaborative et de veille environnementale est prêt à essaimer, la démarche « Fruimalin » est prête à se diffuser. Seules conditions : que la charte, désormais aboutie, soit respectée, et que les initiateurs se forment en deux cycles de formation individualisée. Trois autres unités Fruimalin sont actuellement en gestation en Bourgogne.
Par Francine Narbal
A lire sur le site basta (12/02/15)
Cet article a initialement été publié dans la revue Campagnes solidaires.
C’est en regardant les voitures écraser des kilos de mirabelles tombées sur la chaussée, dans une rue de Dijon, que Thierry Deiller a eu cette idée simple et géniale. Un arbre fruitier adulte peut produire cent kilos de fruits. Mais seulement un cinquième est mangé par les propriétaires du jardin dans lequel il pousse. Pour ne plus laisser se perdre tous ces fruits, une solution : mettre en place un ramassage et une valorisation !
Après un CAP de menuisier puis un mastère à l’École nationale supérieure des Arts et Métiers, notre homme est habité par le désir de restaurer et de préserver l’existant – culturel ou naturel. D’où son envie de créer une association pour éviter la perte des savoirs-faire traditionnels, lutter contre l’individualisme, la solitude, le repli sur soi, la fracture entre ville et campagne.
500 kilos de fruits valorisés chaque mois
Le parcours reste à inventer, pour ne pas laisser perdre ces fruits. D’abord, lancer des appels aux propriétaires d’arbres et de terrains délaissés, en passant par les médias (radios, télévision, journaux locaux). Puis faire des tests de faisabilité, intéresser et trouver des soutiens – région, départements, municipalités – pour obtenir reconnaissance et subventions, s’entourer de bénévoles qui adhèrent au projet, être créatif, écouter, constater, concevoir, relier, prévoir et rendre possible… Bref, travailler comme des fous !
Mais les résultats sont là. Depuis sept ans, Fruimalin récolte, redistribue ou transforme près d’une demi-tonne de fruits par mois. L’association a organisé 62 « veillées Fruimalin » et plus d’une centaine d’interventions de sensibilisation. Elle a aujourd’hui une connaissance approfondie des ressources locales disponibles et non valorisées, une expertise des mécanismes du gaspillage alimentaire et une maîtrise particulière des techniques de collecte, de conservation et de transformation. La démarche a abouti à la création d’un premier emploi en mai 2012, à la mise au point d’une charte, d’une méthodologie.
Une initiative écologique et sociale
Ce soir d’automne, on entre dans la cour au milieu d’un petit jardin foisonnant. Dans l’allée, plein de cageots, surtout de tomates vertes. Sur la droite se trouve le magasin-bureau : des rayons de confitures, compotes, jus, sirops… C’est là que Thierry accueille les « clients », souvent adhérents de l’association, une cinquantaine actuellement. Tous les quinze jours, le mercredi soir, des veillées autour de la table sont organisées dans ce même local. Entre dix et vingt personnes trient, dénoyautent, épluchent, puis se restaurent en discutant chaleureusement. Les plus beaux fruits, mais aussi des légumes récupérés de la même manière, seront distribués aux bénévoles et associations, le reste est transformé, par exemple en confiture. De nouvelles recettes s’imaginent au cours des soirées et des adhérents proposent chez eux de conviviales séances de dégustations-tests.
Le local est aussi le laboratoire de fabrication des confitures et autres produits Fruimalin, ainsi que l’atelier de restauration de tableaux et de bois dorés de Claude Ducatel-Deiller, l’épouse de Thierry, qui anime depuis 2008 un groupe de consom’acteurs dijonnais. Pas de place ici pour le pressoir. Il a été installé à quelques minutes, à Varois-et-Chaignot, sur la ferme de Nicolas Bellet, un ami producteur bio. Fruimalin intervient volontiers dans les centres sociaux, les écoles, les fêtes de quartier, toujours avec le souci de montrer la richesse inépuisable que nous pouvons puiser dans ce patrimoine si nous le respectons.
La démarche a trouvé à Dijon sa vitesse de croisière. Ce modèle de consommation locale collaborative et de veille environnementale est prêt à essaimer, la démarche « Fruimalin » est prête à se diffuser. Seules conditions : que la charte, désormais aboutie, soit respectée, et que les initiateurs se forment en deux cycles de formation individualisée. Trois autres unités Fruimalin sont actuellement en gestation en Bourgogne.
Par Francine Narbal
A lire sur le site basta (12/02/15)