En Vendée, une ZAD contre un projet de nouveau port, imposé contre vents et marées
À Brétignolles-sur-Mer, en Vendée, un projet de port de plaisance suscite une forte opposition. Le littoral, pourtant censé être protégé, a été fracturé par les premiers travaux. Face à une procédure et des décisions publiques qui soulèvent de nombreuses questions, une nouvelle « zone à défendre » s’organise.

Le somptueux pin parasol, qui dominait le rond point à l’entrée de la plage, a disparu. Les haies de chênes verts qui ombrageaient le parking aussi. Ne restent que des trous béants et des fagots de bois. En face, sur le sable, les restes de grands cyprès sont renversés, entremêlés, abandonnés. Un cimetière d’arbres. Un massacre accompli à la tronçonneuse et poursuivi plus loin, à la pelleteuse : en témoigne ce qui reste de la dune qui surplombait la plage. Éventrée, elle est réduite à un talus bancal, encore tapissé d’immortelles aux fleurs jaunes. Sur la plage, en cette semaine de vacances de la Toussaint, des promeneurs, les élèves de l’école de voile, des enfants qui jouent…

La Normandelière, superbe fragment de littoral vendéen qui mêle estran rocheux et plage de sable, telle que l’ont connu des générations de familles de Brétignolles-sur-Mer, n’est déjà plus. La destruction de ce site naturel, considéré depuis 1970 par le Conservatoire du littoral comme une zone à protéger, n’a pris que quelques jours, du 24 septembre au 8 octobre. Le temps d’effectuer les travaux préparatoires au chantier du port de plaisance que le maire de cette station balnéaire, Christophe Chabot, entend créer ici, ex-nihilo : 915 anneaux et deux bassins pour accueillir, dès 2023, voiliers et bateaux à moteur.

Un maire arc-bouté sur un serpent de mer

Depuis dix-sept ans, son projet divise Brétignolles. La station balnéaire compte 4600 habitants, mais multiplie par douze sa population l’été, avec 70% de l’habitat en résidences secondaires. Élu (divers droite) depuis 2001, Christophe Chabot promeut son port de plaisance dès 2002. Plusieurs versions du projet ne sont pas jugées dignes d’examen par les préfets successifs. En 2011, après une enquête publique aux avis unanimement défavorables compte tenu de l’impact environnemental, la Préfecture retoque la copie du maire, lequel, ulcéré, vilipende services de l’État et commissaires-enquêteurs traités de « pieds-nickelés » [1].

En 2018, une mouture légèrement révisée et étoffée en mesures compensatoires est portée par la communauté de communes de Saint-Gilles-Croix-de-Vie, dont Christophe Chabot a pris la tête. Elle passe le cap de la nouvelle enquête publique. Et obtient le feu vert de l’État. En juillet dernier, le préfet de Vendée, Benoît Brocart, signe la déclaration d’utilité publique et l’autorisation environnementale. Depuis, plus de 70 recours en justice ont été déposés par des particuliers, par les associations environnementales locales, mais aussi par la Fédération France nature environnement (FNE), la Ligue pour la protection des oiseaux et l’ONG Surfrider Europe.

D’un côté, la ZAD dite « des gardiens de la dune » entrave les travaux. De l’autre, trois maisons d’opposants historiques ont été taguées le 23 octobre.

En déclenchant les travaux avant que la justice ne se prononce sur le fond, Christophe Chabot a provoqué un électrochoc et avivé les tensions. Les murs des maisons de trois opposants historiques ont été tagués le 23 octobre. Le maire a aussi fédéré les opposants : une « ZAD » où se mêlent et se relaient de jeunes habitants de Brétignolles ou de la région, ainsi que des activistes plus aguerris, a fleuri en lisière de la Normandelière, occupant le terrain et empêchant le passage des engins de travaux depuis le 7 octobre...

Par Eliane Patriarca, Mélanie Bahuon (publié le 07/11/2019)
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